Histoire de l'aquaponie

Comme l'aquaponie est le reflet de la relation entre les plantes et les animaux dans l'écosystème naturel, il peut sembler étrange de lire un article sur une "histoire" distincte de l'aquaponie. Mais en tant que discipline agricole c'est un sujet très intéressant.

Dans le sud de la Chine au VIe siècle, l'aquaponie agricole est intuitivement utilisée dans les rizières. D'autres indices nous mènes jusqu'aux Amériques, où les Aztèques ont développé leurs célèbres "chinampas", ou lits de culture flottants sur radeaux.

Même les Jardins suspendus de Babylone ont été cités comme une première incursion dans l'aquaponie, bien qu'il faille faire attention à la légende historique.

Il y a donc un écart conséquent dans l'histoire avant que l'aquaponie ne soit remis sur le devant de la scène au XXe siècle.


La Chine

Les rizières sont un élément essentiel de l'agriculture chinoise depuis 11000 avant J.-C., soit bien plus longtemps que l'histoire connu. Il n'est pas surprenant que les riziculteurs aient expérimenté et perfectionné leurs techniques au cours de milliers d'années. Le point culminant de cette évolution a été atteint au VIe siècle, lorsque des canards, des poissons et des plants de riz ont été utilisés pour créer un système aquaponique précoce.

Ce système est d'une élégance toute simple. Les canards pékinois élevés dans les rizières mangeaient des insectes, des parasites et des petits poissons. Les déchets de canards riches en nutriments étaient consommés par les poissons (le plus souvent des loches orientales et/ou des anguilles de marais). Les déchets de poisson seraient décomposés par des bactéries nitrifiantes, et les plants de riz nettoieraient ces "déchets" nutritifs et prospéreraient ainsi.

En plus de l'engrais gratuit, les agriculteurs recevaient de la nourriture gratuite pour les poissons grâce aux canards et de la nourriture gratuite pour les canards grâce aux insectes attirés par les rizières. Bien qu'il ne s'agissait en aucun cas d'un système en boucle fermée, les agriculteurs avaient un grand contrôle sur ce système aquaponique, créant même des terrasses en gradins pour créer des microclimats et contrôler l'évaporation et le débit de l'eau.


Les Aztèques

L'utilisation de l'aquaponie par les Aztèques s'est faite de manière assez différente, des milliers d'années plus tard. Alors que les agriculteurs chinois expérimentaient librement pour améliorer leurs cultures. les Aztèques ont été contraints de recourir à l'aquaponie par nécessité.

La capitale, Tenochtitlan, était entourée de marécages. Ces terres, qui étaient inutiles pour l'agriculture normale, ont forcé les Aztèques à improviser et à s'adapter.

Leur solution consistait à construire de grandes îles flottantes artificielles en utilisant de la boue, de la matière végétale en décomposition et des roseaux tissés. Ces îles, ou chinampas, pouvaient être fixées sur place ou mobiles. Des cultures telles que le maïs, les haricots et les courges étaient plantées sur ces chinampas, ce qui permettait de cultiver de grandes quantités de nourriture sur de vastes étendues de lacs et de marécages jusqu'alors inutilisables.

Dans le système des chinampas, ces îles ont été construites dans des écosystèmes déjà florissants, dans des endroits à forte concentration de poissons (une eau riche en nutriments, naturellement). Les cultures plantées profiteraient des nitrates présents dans l'eau et se développeraient rapidement.

Cela contraste avec les systèmes chinois de rizières, dans lesquels les agriculteurs avaient un contrôle beaucoup plus important sur les composants et introduisaient souvent des poissons et d'autres animaux sauvages de manière artificielle. On pourrait qualifier, non sans humour, que les aztèques faisait déjà de la low tech en leur temps.


Les précurseurs du XXe siècle

En 1969, John, Nancy Todd et William McLarney ont fondé le "New Alchemy Institute" dans le Massachusetts. Leur recherche pour l'autonomie alimentaire en respectant la nature les amène à la construction d'un prototype de module agricole, un abri biologique autonome conçu pour répondre aux besoins d'une famille de quatre personnes tout au long de l'année. Leur axes de recherches sont la production de poissons et de végétaux intégré dans une sorte d'abri "The Ark" fonctionnant à l'énergie solaire.

Entre 1975 et 1980, Mark McMurtry (étudiant diplômé) et Doug Sanders (professeur) de l'université d'État de Caroline du Nord (NCSU) ont créé un "système intégré d'aqua-végéculture" (iAVs). Les effluents des bassins de poissons étaient utilisés pour irriguer les tomates et les concombres dans des lits de culture sur sable qui servaient également de bio-filtres.

De nombreux autres instituts de recherches agricoles emboitent le pas et développent de nombreuses techniques hydroponiques pour répondre aux besoins d'une agriculture toujours plus performante et productives. Le marché du hors sol explose dans les années 2000 (tomates en Espagne ou cannabis au Canada et Pays-Bas) et d'importantes sommes sont allouées à l'optimisation et à la recherche.


Conclusion

L'aquaponie s'inspire des relations naturelles au sein d'écosystèmes complexes. C'est pourquoi elle existe depuis si longtemps, de tout temps l'Homme s’applique à domestiquer la nature et à l'améliorer pour son compte. Notre compréhension sur les interactions naturelles est encore incomplète. La recherche agricole à tout son rôle à jouer pour améliorer nos systèmes et je ne doute pas que de nombreuses améliorations vont être apportées dans les années à venir.

J'imagine pour le futur, une meilleure compréhension des symbioses mycorhiziennes, de meilleures filtrations ou bien de systèmes utilisant moins de plastiques.